J’ai le statut d’artiste-auteur photographe depuis le 1er septembre 2014.
Je fais de la photo de façon « sérieuse » et régulière depuis 2006 environ.
Et en y réfléchissant, entre les appareils photos argentiques (jetables ou non, fonctionnant ou non) et le camescope familial, j’ai eu plus ou moins fréquemment dans les mains un « appareil à faire des images » depuis mes 10 ans je pense. Il m’est arrivé de filmer certains moments familiaux quand j’étais ado. Je le faisais souvent avec plaisir, quelques fois non, souvent aussi pour ne pas être sur les images.
C’est d’ailleurs une chose que j’avais plutôt oublié jusqu’à récemment. Quand j’ai décidé de faire de la photographie de façon sérieuse, cet « historique » n’a jamais été cette chose qui m’a donné le déclic : « je veux faire des images ».
Au mieux ça a eu un impact inconscient, au pire ça n’en a eu aucun. Tous les films vus et bouffés avec mes parents puis ensuite de mon propre chef à partir de mon adolescence ont eu à mon avis beaucoup plus d’impact sur ma décision, bien plus tard, de tenter de vivre en créant des images.
Et à partir du moment où j’ai acheté mes propres appareils (compact numérique, puis réflexes argentiques puis numériques) je n’ai jamais arrêté de faire des photos. L’envie était toujours présente, d’abord pour apprendre à en faire correctement, ensuite pour tester des choses, et enfin pour affirmer dans ma tête les choses que j’aime faire.
Depuis un certain temps, l’envie est moins présente. Elle est ciblée sur une ou deux séries de photos et en particulier la série « A -18° tout commence ». Mais je fais moins de portraits, moins de photos de tous les jours, de « trucs ». J’honore les commandes passées, je fais toujours des photos, mais j’en fais moins. Avant j’avais toujours mon appareil photo sur moi que ce soit Alfred, Alcide ou Aelys. J’ai moins envie de shooter tout et n’importe quoi, j’ai moins envie de faire des photos à la va-vite que je n’utiliserai certainement jamais car insatisfait de leur qualité.
J’ai aussi moins d’idées parce que, par flemme, ces derniers mois je ne regarde pas de magazine photo, d’expo, de bouquin. Les idées que je n’ai pas encore concrétisées sont toujours là mais plus de nouvelles ou aucune qui reste, qui soit assez forte pour me dire « ok on note on fait et on le fait vraiment » Bref je n’alimente pas mon imagination ou ma réflexion artistique.
Je ne sais pas si ça arrive à tous les photographes, certainement que si, mais j’ai lu récemment (et c’est une exception) « Errance » de Raymond Depardon.
Il a toujours été l’un de mes photographes favoris même si mon boulot ne ressemble PAS DU TOUT à son travail ne serait-ce que par le « style » ou les thématiques. Loin de moi l’idée de me comparer à lui.
Dans ce livre, Depardon se lance dans un projet autour du concept d’errance et se contraint pour l’exposition et le bouquin à faire « des photographies au format vertical où l ‘horizon serait à égalité entre le haut et le bas, avec trop de ciel, trop de sol […] » en noir et blanc. Il va aussi dans des endroits ou des pays vers lesquels il n’irait pas naturellement (il adore l’Afrique et le désert). Bref il se remet en question, se challenge lui même, se contraint à un certain travail. Il veut sortir d’«une impression de malaise […], un manque d’enthousiasme, des projets flous ».
J’ai eu ce livre par une amie. Je ne l’ai pas commencé de suite l’ayant mis de côté, un peu oublié aussi. Puis je l’ai ouvert au printemps pour le finir durant le roadtrip en Islande.
Je pense que chaque œuvre a un timing pour chaque personne. J’ai attendu des années avant de voir certains films et je pense que je ne les ai que plus appréciés parce que j’étais dans l’humeur, la réception, la réflexion adéquate (ou presque) pour ces films à ces moments là. Je pense la même chose pour une série TV, un livre, la visite d’un musée, la découverte de n’importe quelle « œuvre d’art ».
« Errance » est arrivé dans ma vie un peu tôt mais la lecture de ce bouquin a été, en y repensant, parfaitement adaptée à ma vie photographique de ces derniers mois. Merci Hélène de ce cadeau, il aura finalement eu un impact important sur cette année 2017.
Récemment, il y a donc eu une prise de conscience de cette moindre envie, ou en tout cas ce besoin de faire quelque chose pour renouveler ma réflexion et ma pratique de la photo. Le roadtrip a pris du temps et de l’énergie, mais il y avait la série « A -18° tout commence » à continuer, plus une autre série en cours depuis longtemps qui sortira peut-être un jour. J’ai passé une partie du mois d’octobre à trier et bosser les photos islandaises qui allaient se rajouter à l’exposition, J’ai aussi vu le inktober initiative un challenge pour dessinateurs consistant à réaliser un dessin par jour au mois d’octobre. Je l’avais déjà vu les années précédentes, mais allez savoir pourquoi ça m’a plus accroché cette année.
En fouillant un peu je n’ai pas trouvé d’équivalent en photographie. Il y a bien des « concours » de 7 jours sur facebook ou quelques concours sur des forums mais aucun mais aucun ne correspondait ni sur la longueur ni à l’idée que j’avais . Il y a bien aussi des projets photos mais ceux que j’ai trouvés étaient des projets à très long terme (sur une année par exemple). Je n’ai pas cette rigueur, en tout cas pas maintenant et l’idée est plus de me remuer un peu que de faire un projet complet.
J’en viens donc au titre de cet article : DéceNBre
L’idée de DéceNBre est de faire des photos en noir et blanc chaque jour du mois de décembre et de publier le soir une des photos faites durant la journée. J’essaierai de faire des choses différentes. Lumière naturelle, artificielle, « studio », extérieur, portraits, paysages, architecture (.. aie!). Refaire des choses, réexpérimenter, relancer et s’obliger à shooter.
31 photos donc.
C’est parti !